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    Nomination d’un informateur, formation d’un nouveau Gouvernement et probable dissolution du parlement : Arnold Nyaluma, Professeur de Droit à l’Université Catholique de Bukavu, estime que les initiatives de Félix Tshisekedi ne sont basées que sur la distribution des postes, mais les besoins du peuple congolais ne sont toujours pas pris en compte.

    Ci-dessous l’Interview que vous propose Laprunellerdc.info

    LaPrunelleRDC.info : Dans son adresse à la nation ce dimanche 6 décembre 2020, le chef de l’Etat a annoncé la nomination d’un informateur qui va identifier une nouvelle majorité parlementaire pour la formation d’un nouveau Gouvernement, alors que celui de Sylvestre Ilunga est toujours en place. Est-ce légal ?

    Prof. Arnold Nyaluma : Légal, je dirai oui et non. Non parce que pour constater que la majorité parlementaire n’a plus de confiance dans le Gouvernement, cela doit venir par une motion. Non également par ce qu’il n’y a pas eu démission volontaire du Premier Ministre. Néanmoins, je crois que nous venons finalement d’arriver à ce qui était prévisible depuis 2 ans. Puisque dans un mariage issu du viol, la tendance du partenaire c’est de se sauver.

    La Prunelle : Est-ce qu’on peut dire que le Gouvernement a échoué la mise en œuvre du Programme du chef de l’Etat comme il l’a dit ?

    Prof. Nyaluma : Le Chef de l’Etat est le chef du Gouvernement. Et si le Gouvernement échoue c’est lui qui aura échoué. Un chef ne passe pas son temps à se plaindre. Un chef dirige.

    « Ce sont malheureusement des manigances politiques qui vont nous prendre encore peut-être six mois »

    La Prunelle : Que va faire l’informateur qui sera incessamment nommé ?

    Prof. Nyaluma : Théoriquement, l’informateur doit identifier une nouvelle majorité. C’est-à-dire qu’il va poser la question aux gens de Lamuka et autres s’ils veulent participer au Gouvernement. Il va éventuellement chercher à débaucher certains députés du FCC. Et il va probablement arriver à constituer une majorité alternative, s’il arrive à un niveau qui dépasse 250. Ce qui impliquerait que le FCC sera en ce moment-là dans l’opposition.

    La Prunelle : Et s’il n’arrive pas à identifier une nouvelle majorité absolue ?

    Prof. Nyaluma : Un drame peut se produire. Il peut arriver qu’après tous ces efforts la majorité du FCC reste intacte. Dans ce cas c’est le FCC qui va encore former le Gouvernement. Mais dans cette situation où il y a une crise de confiance entre le Chef de l’Etat et son partenaire, il y aura un problème sérieux. Nous devons aussi rappeler que la recomposition (de la majorité) ne concerne pas le sénat, ni les Assemblées provinciales. Ce sont malheureusement des manigances politiques qui vont nous prendre encore peut-être six mois, peut-être une année.

    La Prunelle : Le Règlement Intérieur de l’Assemblée nationale affirme pourtant qu’au début de chaque législature, les partis et regroupements politiques déposent au Bureau provisoire de l’Assemblée nationale une déclaration d’appartenance à la Majorité ou à l’Opposition, et ce droit ne peut être exercé qu’une fois au cours de la législature.

    Prof. Nyaluma : C’était une prudence qui était entretenue par la majorité détenue par le FCC. Mais vous savez que la révolution ne s’embarrasse pas du respect des rôles. Et donc identifier une nouvelle majorité équivaut à gêner le Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale. Avec cet avantage que le chef de l’Etat a la Cour constitutionnelle avec lui, personne ne dira que cette démarche est illégale.

    « Si on si on dissout l’Assemblée nationale, nous serons entrain de quitter la voie démocratique »

    La Prunelle : Le chef de l’Etat n’a pas exclu de dissoudre l’Assemblée nationale au cas où l’informateur ne parvenait pas à trouver une nouvelle majorité. Il y a-t-il actuellement une crise, encore persistante, entre le Gouvernement et le Parlement qui sont tous dirigés par le FCC ?

    Nyaluma : Une crise politique on la crée, Félix Tshisekedi va essayer de trouver un informateur. Si après on forme un Gouvernement et qu’il n’est pas investi par cette Assemblée, à ce moment-là on constate qu’il y a une crise, et on va dissoudre l’Assemblée. Mais je crois aussi que cette annonce est une manière d’intimider les députés, pour leur dire qu’ils vont perdre leurs mandats.

    La Prunelle : Qu’est ce qi se passera s’il décide finalement de la dissoudre ?

    Nyaluma : Lorsqu’on dissout une Assemblée, ça signifie qu’il donne 90 jours pour qu’on organise des nouvelles élections. Or, dans le même discours du chef de l’Etat, il a semblé dire qu’avant même de désigner les animateurs de la CENI (Commission électorale), il faut revisiter la loi électorale. Et on ne peut le faire qu’à travers l’Assemblée Nationale et le Sénat. Donc, si on dissout l’Assemblée nationale, nous serons devant une impasse. On sera entrain de quitter la voie démocratique.

    La Prunelle : Que gagne au final le peuple congolais ?

    Nyaluma : Ce qui vient d’arriver inaugure une crise qui va être peut-être fatale pour l’ensemble du peuple congolais. Parce qu’en suivant le discours du Chef de l’Etat, on constate qu’il y a une série de problèmes. Mais en termes de solution, tout est basé sur la reconfiguration pour la distribution des postes. On veut seulement associer Lamuka (Katumbi et Bemba) et débaucher certaines personnes (FCC). Mais la question réelle en termes de besoins du peuple congolais n’est pas prise en compte.

    Propos recueillis par Museza Cikuru

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