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    Le juge pénal et civil congolais a-t-il failli à son obligation de faire respecter le droit de Vital Kamerhe à l’innocence présumée ? (Critique de l’usage de la liberté d’opinion dans une affaire pénale en pleine instruction) ; C’est la tribune du Me André Hilaire Kashikisha, Avocat, Chercheur et analyste Politique que vous propose Laprunellerdc.info.

    Cet avocat, chercheur et analyste politique revient sur l’affaire qui a conduit à la détention de Vital Kamerhe et s’interroge si la passivité du ministère public face au lynchage médiatique de Kamerhe notamment vise à préparer l’opinion à sa condamnation alors que Kamerhe a toute sa présomption d’innocence.

    Ci-dessous la tribune que vous propose Laprunellerdc.info.

    « Le juge pénal et civil congolais a-t-il failli à son obligation de faire respecter le droit de Vital Kamerhe à l’innocence présumée ? (Critique de l’usage de la liberté d’opinion dans une affaire pénale en pleine instruction).

    Dans l’opinion publique, Vital KAMERHE est déjà vu comme « un coupable ». Et l’inertie des autorités judiciaires constatée face à la violation si ostensible de son droit à l’innocence présumée par les médias et sur la toile me contraint à la perplexité. 

    Il en est de même de l’impunité flagrante dont jouissent (sans aucune inquiétude), ceux qui s’y adonnent sans répit, dès l’entame de leurs débats télévisés et radiodiffusés et sur la toile dans les réseaux sociaux. 

    Pourquoi l’autorité judiciaire (notamment le Ministère public) ne se saisit pas d’office des violations faites par les médias ou par voie de ceux-ci au droit de Vital KAMERHE à l’innocence présumée alors que l’affaire est en instruction ? Serait-ce une manière de préparer l’opinion à la condamnation programmée ? Telle est notre questionnement principal. 

    Ce comportement illégal qui n’est pas jusque-là contenu étale une application sélective des principes de droit dans un Etat démocratique, et trouble la netteté de lignes théoriques posées par la loi, et aussi l’utilité pratique des conséquences positives que la victime (en l’occurrence Vital KAMERHE) serait en droit d’en tirer sur le plan judiciaire. 

    En effet, si le pouvoir judiciaire veut prendre véritablement un tournant décisif dans le renforcement de son indépendance, n’est-il pas plus correct d’asseoir la justice dans la défense de tous les principes protecteurs des droits et libertés reconnus ? 

    Autant on poursuit les présumés détourneurs des fonds publics, autant il faut aussi s’intéresser à ceux qui violent leur droit à l’innocence présumé dans les médias et sur la toile. 

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    Le sens de l’urgence pour agir doit se trouver renforcé par le jugement objectif de l’environnement social général actuel, aiguisé par toutes ces décennies de pratiques illégales, et qui mettent en cause, à la fois les agents judiciaires et les particuliers, et qui ont corrodé les droits des personnes détenues, ou même parfois contribué à tort à leur condamnation. 

    Le droit à l’innocence présumée de Vital KAMERHE est mis à rude épreuve, apparemment sous un regard approbateur du juge pénal et civil congolais, qui devrait faire cesser sa violation dans les médias. C’est ce constat qu’il convient de relever d’emblée. 

    Car en effet, si l’une des conséquences de jouir pleinement de son droit à l’innocence présumée est que « seul le jugement définitif établisse la culpabilité de l’accusé », cela implique un autre droit plus important, « celui de ne pas être présenté comme coupable avant toute condamnation », et se voir ainsi attribuer une condamnation par anticipation. 

    Au regard des propos tenus dans l’opinion publique, les commentaires sur la toile ou dans les émissions télévisées ou radiodiffusées, Vital KAMERHE serait lui, exclu du bénéfice, de la présomption d’innocence, et cela, sous la barbe du pouvoir judiciaire. 

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    Pourtant, nul ne peut donc, en violation de la présomption d’innocence, évoquer « la culpabilité de l’accusé » dans une affaire encore en instruction au Parquet, en se basant simplement sur « des indices de culpabilité ». 

    C’est malheureusement ce constat qui est fait dans l’affaire Vital KAMERHE, et qui démontre que « la présomption de culpabilité » prime sur « celle d’innocence », alors que toute violation de cette exigence doit donner lieu à une réparation du préjudice subi dans tous les cas de figure. 

    Ainsi, sans aucune prétention à l’exhaustivité, il convient de rappeler certaines implications de la présomption d’innocence, notamment : le droit à un juge pénal sans préjugement ni préjugé (1°) ; le rejet de tout préjugement résultant de la confusion des fonctions judiciaires(2°) ainsi que le droit à un juge civil, garant de sa présomption d’innocence et des réparations civiles éventuelles (3°). 

    1°) Droit au juge pénal, juge de l’innocence présumée sans préjugement ni préjugé

    Le juge pénal « est le seul à décider de la culpabilité de l’accusé » et non les membres du pouvoir exécutif ou des particuliers, soit-il en usage de leur liberté d’expression ou d’opinion. Selon Serges GUINCHARD et Jacques BUISSON dans Procédure pénale (Ouvrage couronné par l’Académie des Sciences morales et politiques Prix Henri Texier 2000 pour la défense de la liberté individuelle, Paris, LexisNexis, 2012, p.418 et sv.), le droit de l’inculpé au juge pénal, (donc juge de la présomption d’innocence), signifie que « les autorités publiques ne peuvent pas se substituer au juge pénal qui sera chargé du fond de l’accusation »; d’une part. 

    Et d’autre part, que seul « un tribunal peut renverser la présomption d’innocence en condamnant une personne dans ou après un procès conforme aux principes légaux directeurs. Il s’en suit que le juge pénal doit respecter la présomption d’innocence, en ne portant pas de préjugement sur la personne accusée, et en ayant pas de préjugé sur elle. ». (Serges GUINCHARD et Jacques BUISSON, op. cit.) 

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    Dès lors, « aucune personne, membre d’une autorité publique ou encore moins un particulier, ne doit porter atteinte, par des propos tenus publiquement par exemple, à la présomption d’innocence de quelqu’un, même en dehors de tout procès ». (Serges GUINCHARD et Jacques BUISSON, op. cit.)

    Limpidement, les particuliers et les autorités étatiques sont tous débiteurs au respect dû à l’innocence présumée. (André Hilaire KASHIKISHA, Liberté de presse et présomption d’innocence. (La procédure pénale et les dérives des procès médiatiques), Delt-august, Kinshasa, 2020, (inédit et sous presse), p. 51.) Et « il n’est pas nécessaire qu’on soit justiciable pour bénéficier de cette protection ». (Serges GUINCHARD et Jacques BUISSON, op. cit. p. 420). 

    Et la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) rappelle à cet égard que : « le public, la police, les autorités politiques et judiciaires doivent respecter la présomption d’innocence en évitant des déclarations aux médias pendant le cours de l’instruction, dès lors qu’elles seraient attentatoires à cette présomption ». (CEDH, 2 juin 2009, req. n° 24528/02, X c/Slovaquie). 

    Dans le même sens, la même Cour avait aussi jugé que « le juge porte atteinte à la présomption d’innocence lorsque, saisi d‘une demande d’indemnisation pour détention provisoire injustifiée, il la refuse au motif que le demandeur a certes été acquitté, mais qu’il aurait pu être condamné si une autre qualification avait été retenue ! ». (CEDH, 9 nov. 2004, Del Latte c/Pays-Bas). 

    Ou encore, « lorsque, saisis d’une action en diffamation à la suite d’une émission de télévision mettant en cause une personne faisant l’objet des poursuites pénales, des juges affirment, dans la décision sur cette action en diffamation, que les propos incriminés reflétaient la réalité ». (CEDH, 19 mai 2005, Diamantides c/ Grèce). 

    Plus constamment encore, sous l’angle de la présomption d’innocence, les organes européens ont affirmé plusieurs fois qu’il y a violation de la présomption d’innocence, « si, sans établissement légal de la culpabilité d’un prévenu et notamment sans que ce dernier ait eu l’occasion d’exercer les droits de la défense, une décision judiciaire le concernant reflète le sentiment qu’il est coupable. Il peut en aller ainsi même en l’absence de constat formel ; il suffit d’une motivation donnant à penser que le juge considère l’intéressé comme coupable ». (CEDH, 25 mars 1983, Minelli c/ Suisse, série A, n° 62, § 37. – Et déjà, Commission, avis, 15 juill. 1976, R. Liebig c/RFA : Rec. 2002, 5, p. 58.− Et aussi, CEDH, 26 mars 1996, Leutcher c/ Pays-Bas : Rev. Sc. Crim. 1997, 470, obs. R. Koering-Joulin). 

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    Bien que cette jurisprudence soit restée constante (Serges GUINCHARD et Jacques BUISSON, op. cit., p. 426), seules les décisions qui reflètent le sentiment que la personne concernée est coupable violent la présomption d’innocence, car elles ne se sont pas bornées à décrire un état de suspicion. 

    Toutefois, toutes les expressions émettant diverses hypothèses vécues dans l’affaire KAMERHE, et qui professent clairement sa culpabilité avant toute condamnation peuvent bien donner lieu à l’ouverture du droit d’action pour obtenir indemnisation, car il s’agit là, « d’un préjugement sans respect des droits de la défense ». 

    Les cas similaires ont été condamnés en droit comparé par la chambre criminelle française qui avait sanctionné le préjugement sur le fondement de l’article 6 § 2, de la Convention EDH, en censurant un tribunal de police ayant motivé son jugement en énonçant que : « l’attitude des prévenus laissait présumer qu’ils n’ont rien à objecter et que les contraventions qui leur sont reprochées paraissent suffisamment établies ». (142 Cass. Crim., 19 mars 1986: Bull, crim. 1986, n°113; D. 19988, 568)

    Aussi, diverses interventions des autorités tant judiciaires, policières que politiques sur la toile dans l’affaire Vital KAMERHE démontrent la violation du respect de sa présomption d’innocence, d’autant plus qu’elles ne traduisent pas « le rejet du préjugement de l‘accusé qui résulterait de la confusion des fonctions judiciaires ». 

    2°) Le rejet de tout préjugement résultant de la confusion des fonctions judiciaires 

    C’est ici qu’il convient de relever la nécessité de respecter les prérogatives du pouvoir judiciaire par le pouvoir exécutif comme principe traduisant « un équilibre approprié dans l’application du principe de la séparation des pouvoirs dans un Etat démocratique ». (André Hilaire KASHIKISHA, op. cit. p. 61.). 

    Dans l’affaire Vital KAMERHE, l’hypothèse de « la présomption de culpabilité » est apparemment la plus applicable, au regard des propos tenus dans les médias même par les autorités du pouvoir exécutif, et dans lesquels il ne me semble pas être traité avec « respect et ménagement », mais plutôt d’office présenté par tous comme « coupable ». 

    Les propos tenus fréquemment ne laissent aucune place à sa présomption d’innocence, car on est surpris par des propos du genre, « les faits sont établis », « Vital KAMERHE est l’auteur de ces actes ou des tels faits », « les preuves à charge sont accablantes et irréfutables », alors qu’on n’est qu’ à la phase des investigations et de l’instruction. 

    La tendance générale à tenir ces propos devant la presse ou encore dans les médias publics ou privés et curieusement par ceux qui sont censés la protéger, la respecter et la faire respecter aggrave cette violation, et porte un coup dur à sa présomption d’innocence. 

    Les autorités politiques qui s’y adonnent font un usage détourné de leurs attributs, et se substituent de facto aux magistrats instructeurs et aux juges. Les magistrats du parquet qui instruisent cette affaire sont des magistrats de carrière ayant une connaissance approfondie du droit, et sont davantage capables de l’instruire en tenant compte des exigences de la loi. 

    Même du côté des autorités judiciaires elles-mêmes (notamment les magistrats instructeurs), alors même que le principe essentiel en matière d’instruction veut que le Ministère Public instruise à charge et à décharge, cette affaire donne l’impression de ne s’instruire qu’à charge. 

    Cependant, en vertu de la présomption d’innocence, ils se trouvent devant une obligation double de respecter sa dignité comme « l’homme suspecté » et aussi « d’assurer que la justice lui soit rendue sans préjugement », surtout à cette phase où la détention préventive clairement définie par la loi n’est pas encore une condamnation. 

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    Au cas contraire, comment espérer que le procès soit équitable, « si à cette phase de l’instruction préparatoire, la présomption d’innocence est déjà violée constamment par les médias et les particuliers » sans réaction du pouvoir judiciaire, comme si on prépare déjà l’opinion publique à l’idée « d’une culpabilité préalable au jugement » de condamnation ? 

    Des préjugés portés sur l’accusé et aussi par certains actes jugés non conformes à la justice et à l’équité ne sont-ils pas contraires au serment de fidélité des magistrats et des juges à la constitution qui fixe les principes de l’égalité de tous devant la loi (Article 12) et la présomption d’innocence (Article 17, alinéa 9) en vue d’instaurer la justice dont ils sont censés être les garants ? 

    La jurisprudence rappelle que « le juge ne doit pas montrer au prévenu, à l’accusé, ses sentiments sur sa culpabilité ou son innocence ». (Cass. crim., 3 nov. 1992 : D. 1993, 538, note Vallens. – CA Metz, 9 sept. 1997: LPA 15 dec. 1997, 21, note Vallens). 

    Mais le constat général face au silence observé dans les milieux du pouvoir judiciaire dans le déferlement médiatique désignant déjà KAMERHE comme « un coupable » avant toute condamnation permet de dénoncer la crise profonde et l’inertie du pouvoir judiciaire, qui, comme le rappelle (Jean Louis BERGEL, Méthodologie juridique, PUF, 

    Edition Thémis, 2001, p. 355), « semble le conduire à s’affranchir de certaines exigences de la loi ». 

    Il est dès lors important de rappeler aux juges le respect de la mission que le droit leur confie au service de la société démocratique, non celui de leurs passions, de leurs vindictes, de leurs ambitions (J. L. BERGEL, op. cit.)

    Sans stopper la condamnation anticipée de Vital KAMERHE dans les médias et sur la toile, la confusion et l’insécurité sont inévitables, parce que la violation de son droit à l’innocence présumée par les agissements qui y prolifèrent préjudicient à ses droits que le pouvoir judiciaire devrait faire respecter et conduirait au résultat contraire au droit, d’une part. D’autre part, ne pas poursuivre ceux qui s’y adonnent sans trêve en longueur des journées constitue une fraude à la loi destinée à éluder son application normale qu’on estimerait parfois comme « venant gêner les intérêts et les volontés ». (J. L. BERGEL, op. cit., p. 355). 

    C’est pour autant dire que les juges ne doivent pas dénaturer et outrepasser leur fonction. S’ils n’appliquent pas le droit « en toute sa globalité », ils répandent alors la subjectivité qu’ils devraient refréner, d’autant plus qu’elle vole aux justiciables les garanties qu’ils sont en droit d’exiger ». (Georges RIPERT, La règle morale dans les obligations civiles, LGDJ, 1949, n° 173). 

    Face à la violation répétitive et répétée de son droit à l’innocence présumée par les médias et par les particuliers sur la toile, Vital KAMERHE devrait envisager de saisir le juge civil garant de sa présomption d’innocence et de ses réparations civiles éventuelles. 

    3°) Droit à un juge civil, garant de la présomption d’innocence et des réparations civiles éventuelles 

    Face aux différentes violations du droit à l’innocence présumée de Vital KAMERHE, les différents mécanismes de réparation devraient être envisagés. Il s’agit ici de rappeler certaines prescriptions légales qui confortent le juge civil en appui à la victime de cette violation. Ici, le juge civil est dans son rôle concret de sa protection de manière générale, mais surtout pour avoir été exposée comme coupable. 

    Etant donné que Vital KAMERHE est déjà présenté dans l’opinion publique comme tel avant toute condamnation dans les médias, le rôle du juge civil est de faire respecter et protéger le respect de ce droit, car même s’il venait à être acquitté, dans l’opinion publique il restera considéré comme « coupable », surtout dans une pratique médiatique où les médias reviennent difficilement sur leurs informations. 

    En droit comparé, le rôle du juge civil dans la protection de la présomption d’innocence a été renforcé et rappelé. En France, ce juge est prévu à l’article 9-1 du Code civil, où il a été introduit par la loi du 4 janvier 1993, revue et corrigée (en moins bien) par celle du 24 août 1993, l’article 9-1 alinéa 2, rétabli dans sa version d’origine par la loi du 15 juin 2000 (contre l’avis du gouvernement). 

    Elle prévoit que : « lorsqu’une personne est présentée publiquement, avant toute condamnation, comme coupable de faits faisant l’objet d’une enquête ou d’une instruction judiciaire, le juge peut, même en référé, ordonner toutes mesures, telles que l’insertion d’une rectification ou la diffusion d’un communiqué aux fins de faire cesser l’atteinte à la présomption d’innocence… ». (S. GUINCHARD et J. BUISSON, op. cit., p. 423. ). 

    Cette loi protège la présomption d’innocence même en dehors de toute procédure pénale engagée contre la personne, et non seulement quand on est mis en cause par la justice (S. GUINCHARD et J. BUISSON, op. cit., p. 423. ). 

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    Ainsi, pour la Cour de cassation française, « la seule constatation de l’atteinte au respect dû à la vie privée et à l’image par voie de presse caractérise l’urgence et ouvre droit à réparation ». (Cass. 1re civ., 12 déc. 2000 (aff. Johnny et Leaticia Halliday), citée par S. GUINCHARD et J. BUISSON, op. cit., p. 423.)

    Ceci revient à dire qu’il « suffit que l’écrit ou les propos litigieux contiennent des conclusions définitives manifestant un préjugé tenant pour acquise la culpabilité de la personne visée ». Or dans le cas d’espèce, Vital KAMERHE partout vilipendé est présenté comme coupable à la fois par des particuliers et même les autorités politico- judiciaire qui recourent aux médias aussi bien dans leur forme écrite qu’audiovisuelle, ou encore sur les réseaux sociaux. 

    La liberté d’expression et d’opinion reconnue ne donne pourtant pas droit d’ignorer la présomption d’innocence lorsqu’on doit s’exprimer sur les affaires pénales en cours, et ne doit pas s’exercer de façon à consacrer la culpabilisation par projection d’un inculpé, avant tout jugement le condamnant (André Hilaire KASHIKISHA, op. cit. p. 316). 

    En droit pénal congolais, outre « la calomnie et les imputations diffamatoires », la loi n°96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de la presse, en son article 79 érige en délit de presse « les actes de nature à violer le secret d’instruction et des délibérations judiciaires », notamment l’interdiction de la publication « des actes d’accusation et tous les autres actes de procédure judiciaire avant qu’ils n’aient été lus en audience publique ». 

    Il reste dès lors à Vital KAMERHE la possibilité de s’appuyer sur ces dispositions, mais aussi sur quelques pistes de solution identifiables dans la législation, pour faire respecter son droit à l’innocence présumée à tous. En l’absence d’une loi relative à l’indemnisation des victimes des violations du droit à l’innocence présumée comme en droit belge, les dispositions pénales incriminant les atteintes diffamatoires et méprisantes, la calomnie peuvent être exploitées. Elles incluent généralement les imputations dommageables et injures prévues et réprimées aux articles 74, 75 et 77 du code pénal ordinaire, ou encore celles se rapportant aux dénonciations calomnieuses prévues à l’article 76 du même code. 

    Au plan civil, l’action en indemnisation peut être aussi intentée en vertu de l’article 258 du Code civil congolais Livre III. Plus globalement encore, la violation de son droit à l’innocence présumée par les médias peut être poursuivie sur fondement l’article 79 de la loi du 22 juin 1996 sur la liberté de la presse précitée en son article 79, sous l’angle de délits de presse sur le plan procédural, d’autant plus que les actes de procédure de son dossier en instruction sur la toile sont en lien étroit avec ce qu’il faut considérer comme une violation flagrante du « secret de l’instruction » en vue de l’exposer au mépris public 

     Conclusion 

    Nul ne peut donc, en violation de la présomption d’innocence, évoquer la culpabilité de l’accusé comme ayant été établie irréfragablement et définitivement, comme c’est seul le jugement définitif qui l’établit. On ne peut permettre que le juge pénal (le seul à décider de la culpabilité de l’accusé à l’issue d’un long processus d’instruction et de jugement), puisse se passer des exigences de la justice et de la loi, et laisser les tierces personnes à l’instruction imposer dans l’opinion publique le sentiment propre qu’ils se sont forgés sur la culpabilité de Vital KAMERHE. 

    Face à l’étendue des pouvoirs dont il est investi, le Ministère Public qui le poursuit, (parce que soumis à l’épreuve de la maîtrise du dossier, de la compréhension des faits lui soumis, de l’examen scrupuleux des allégations des parties, des preuves de leurs prétentions, après instruction à charge et à décharge), devrait poursuivre toute personne qui tend à déformer et annihiler ses efforts dans la recherche de la manifestation de la vérité dans l’opinion publique. 

    Dans l’exercice de leur fonction les juges ne sont soumis qu’à l’autorité de la loi, les pouvoirs législatif et exécutif ne pouvant ni statuer sur les différends juridictionnels ni modifier une décision de justice, ni s’opposer à son exécution. Pendant toute cette période délicate de l’instruction de cette affaire complexe, toutes les limitations faites à la liberté de la presse, à la liberté d’expression et au droit du public à l’information doivent valoir, pour faire jouir Vital KAMERHE de l’effectivité de son droit à l’innocence présumée. 

    Les médias, les autorités judiciaires et politiques ainsi que les particuliers doivent observer ces limites légales pendant cette période où le prévenu prépare sa défense et réunit ses moyens de preuve. Ces limites doivent s’observer sous la vigilance à la fois du juge pénal, mais aussi du juge civil, considérés avec raison comme le garant de la présomption d’innocence et des réparations civiles éventuelles en cas de sa violation par qui que ce soit. 

    Me André Hilaire KASHIKISHA,

    Avocat, Chercheur et analyste Politique »

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    Un commentaire

    1. Concerned Citizen on

      Il faut punir toute personne ou groupe si possible qui aurait viole la presomption d’innoncence en cas d’aquittement comme seul moyen de mitiger les consequences et ses implications de propos diffamatoires largue contre VK par cette premiere avant le commencement de son proces.

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