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    Le Bureau de l’Assemblée Nationale est dans la tourmente, après que son Président ait annoncé la semaine dernière « le don » de 500 jeeps, « cadeau » du Chef de l’Etat aux députés nationaux, pour avoir rejoint l’union sacrée. Christophe Mboso et son équipe remuent ciel et terre pour tenter de sauver la face, alors que des organisations et personnalités qui parlent déjà d’un acte de « corruption » à ciel ouvert, appellent à une enquête.

    L’affaire qui a provoqué un tollé général, commence le vendredi 18 juin dernier. Lors d’une séance, le président de l’Assemblée Nationale a expliqué que l’octroi d’un véhicule à chacun des 500 députés nationaux était une décision du Président de la République Félix Tshisekedi, pour remercier les élus d’avoir matérialisé son appel pour une Union Sacrée.

    « C’est grâce à vous [députés]. Vous avez matérialisé l’appel du chef de l’État [Union Sacrée]. C’est grâce à ça que tous les députés vont bénéficier des Jeeps,» a dit Christophe Mboso, annonçant la bonne nouvelle aux députés de l’Union Sacrée. 

    Plus de 41.000 dollars par véhicule, soit un peu plus de 20 millions des dollars, dans un pays où les besoins sociaux sont nombreux; et où la grande partie de la population se plaint de ses conditions de vie; avec notamment des enseignants et fonctionnaires de l’État non payés, des infirmiers en grève ou des besoins alimentaires croissants.

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    Les réactions n’ont pas tardé. Beaucoup qualifient cet acte de corruption. C’est le cas de Jean-Claude Katende, Président national de l’Association Africaine des Droits de L’Homme (ASADHO); qui demande d’où est venu l’argent pour financer l’achat de ces véhicules, et dans quel budget est-ce prévu.

    «Pourquoi le Président Tshisekedi donne des jeeps aux députés nationaux? D’où vient l’argent qui a acheté ces jeeps ? C’était prévu dans quel budget ? Cet argent ne pouvait pas être affecté aux problèmes du peuple?,» demande-t-il.

    Cadeau ou Crédit ?

    De son côté, l’Observatoire de la dépense publique (ODEP) estime le processus qui a conduit à l’acquisition de ces véhicules, est bien loin des procédures usuelles.

    «Dans l’ancien temps, c’étaient des crédits véhicule. Le député reçoit le véhicule et on commence à retrancher une quantité sur son salaire, à chaque mois. Mais pour le cas échéant, ce ne sont pas des crédits véhicule. Selon les informations en notre possession, il s’agit d’un don. Le président de l’Assemblée nationale, lui-même, a confirmé que c’était un don du chef de l’État envers les députés de l’Union sacrée. C’est-à-dire que c’est une récompense par rapport à la création de l’Union sacrée. C’est cela, le vrai problème,» a dit Valery Madianga, son Porte-parole.

    L’ODEP explique que l’autre problème, c’est au niveau de la passation du marché public. «Si c’était le crédit véhicule, c’est l’Assemblée Nationale qui devait lancer l’appel d’offres, et sélectionner un fournisseur de véhicule. Ici, c’est le gouvernement, selon nos informations. D’abord, cet appel d’offres n’a pas été publié conformément à la loi. Le processus a été opaque,» ajoute Valery Madianga.

    Mais le Rapporteur de la Chambre basse du parlement, Joseph Lembi a expliqué dans un communiqué ce mardi 22 juin 2021; que c’est le Bureau de l’Assemblée Nationale qui avait passé une commande de 500 jeeps auprès d’une forme de la place, dans le respect des normes. Selon lui, les jeeps commandées par le Bureau, comme à chaque législature, seront accordées à crédit aux députés nationaux.

    Des précisions qui entrent en parfaite contradiction avec le Président de l’Assemblée Nationale, qui a été clair vendredi dans ses propos, parlant d’une «récompense» du Chef de l’État.

    Enquête IGF

    Tout comme Jean-Claude Katende, l’ODEP a appelé l’Inspection générale des Finances à enquêter sur l’origine des fonds qui ont servi à l’achat de ces véhicules.

    «Nous demandons que l’Inspection générale des Finances, qui a en charge d’auditer les comptes publics; puisse enquêter sur l’origine de ces fonds, qui ont permis d’acheter des véhicules que l’on va octroyer gratuitement aux députés. Pour nous, c’est un scandale,» dit cette structure.

    « Tout député national qui prendra le véhicule offert par le président de la république sera considéré comme corrompu. Demandez qu’on annule l’achat de ces véhicules et que l’argent soit affecté à la gratuité de l’enseignement. Montrez vous patriotes, » ajoute de sa part le Président de l’ASADHO.

    Mais en attendant, les députés devraient recevoir d’ici à juillet leur jeeps tous neufs. Le Rapporteur de l’Assemblée Nationale a indiqué qu’il était plus honorable que les élus de la nation aient une mobilité, qui leur donne un peu plus de dignité.

    «Pendant plus de deux législatures, les députés nationaux se rendent aux travaux de la plénière et des commissions à moto ou en taxi. L’Assemblée Nationale a enregistré beaucoup d’accidents,» dit Joseph Lembi dans son communiqué.

    Cependant, certains députés ont rejeté l’offre: «Affaire 500 jeeps : C’est une forfaiture signée Union sacrée, en récompense à une manœuvre politicienne : Enterrer la majorité issue des urnes.  On ne peut prétendre lutter contre la corruption par la corruption. Non. Je ne me sens pas concerné,» a dit le député Néhémie Mwilanya, du Front Commun pour le Congo.

    Cadeaux? Prêt? En tout cas la polémique enfle et le bureau Mboso multiplie des sorties médiatiques à peine convaincantes, pour justifier cette énième bourde signée « Union Sacrée ».

    Museza Cikuru

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