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    Le Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de l’Homme (BCNUDH) donne quelques recommandations pour la lutte contre des messages et discours d’incitation à la haine tribale. Ceci après avoir répertorié différents messages dans ce sens au cours de l’année écoulée.

    En effet, en 2020, le BCNUDH a rapporté plusieurs cas de discours et messages haineux à travers les médias, les réseaux sociaux, les communiqués de presse d’acteurs politiques et religieux.

    Au Gouvernement

    Le BCNUDH recommande de renforcer sa lutte active contre les stéréotypes et la discrimination envers les individus et les communautés à cause de leur identité ethnique, religieuse, de genre, etc.

    « Ces efforts devraient notamment passer par la promotion de la culture de la paix, de la tolérance et de la coexistence pacifique; l’éducation pour favoriser le respect mutuel et la tolérance entre les groupes de la population; la formation et la sensibilisation des personnels concourant à l’administration de la justice; l’adoption de lois et politiques anti-discrimination exhaustives qui comprennent tant des mesures préventives que correctives; et le renforcement des organes et institutions visant à assurer l’égalité et la non-discrimination », dit-il.

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    Le BCNUDH appelle également à lutter contre l’impunité pour les violations et abus des droits de l’homme de part et d’autre des communautés et consolider les mécanismes et infrastructures judiciaires, notamment en renforçant les ressources financières et humaines ; l’indépendance des juges ; le professionnalisme et l’indépendance de la profession juridique privée ; la publicisation et l’informatisation des jugements.

    « D’accorder une attention particulière aux minorités et aux groupes en situation de vulnérabilité à cause de la stigmatisation, de l’exclusion et de la marginalisation ancrées ou historiques dans la vie politique, économique et sociale de la société dont souffrent ces groupes ».

    Au Parlement

    Au Parlement, le BCNUDH recommande de s’assurer que toute future loi sur les discours et messages incitatifs à la haine et la violence soit conforme aux normes et standards du droit international des droits de l’homme afin de préserver les libertés d’opinion, d’expression, d’association et de réunion pacifique.

    « Concrètement, et compte tenu des risques que les lois interdisant l’incitation à la haine puissent être interprétées de manière large et appliquées sélectivement par les autorités, il est nécessaire que ces lois soient formulées d’une manière qui ne laisse aucune place à l’ambiguïté et que des garanties efficaces soient prévues pour éviter tout abus. Ensuite, toute restriction aux droits fondamentaux devrait remplir les conditions de légalité, nécessité et proportionnalité », poursuit ce rapport.

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    Par ailleurs, la réforme du cadre légal devrait clairement permettre de distinguer entre trois cas de figure : l’expression qui constitue une infraction pénale ; l’expression qui n’entraîne pas de sanction pénale mais peut justifier une procédure civile ou des sanctions administratives ; et l’expression qui ne donne pas suite à des sanctions pénales, civiles ou administratives mais pose néanmoins des problèmes en matière de tolérance, de civilité et de respect des droits d’autrui.

    Aux acteurs politiques et religieux

    Aux acteurs politiques et religieux, il recommande de s’abstenir d’utiliser des messages d’intolérance ou des expressions pouvant inciter à la violence, à l’hostilité ou à la discrimination ; de dénoncer fermement et immédiatement l’intolérance, les stéréotypes discriminatoires et les manifestations d’incitation à la haine qui attisent la violence, la discrimination ou l’hostilité, y compris celles qui conduisent à des crimes atroces.

    « D’affirmer que la violence ne peut pas être justifiée par une provocation préalable ; De protéger les droits de toutes les personnes appartenant à des minorités, y compris leur droit à participer également et effectivement à la vie culturelle, religieuse, sociale, économique et publique, conformément au droit international des droits de l’homme », recommande encore le BCNUDH.

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    Il recommande aussi d’adapter et appliquer des directives éthiques relatives à la conduite des représentants des partis politiques, surtout dans le cadre des allocutions publiques, et sensibiliser leurs membres sur les dangers de la propagation des discours haineux. 

    Aux acteurs médiatiques

    Aux acteurs médiatiques, le BCNUDH recommande de respecter le Code de déontologie et de l’éthique du journaliste congolais du 4 mars 2004, dont l’article 5 exige des journalistes qu’ils bannissent « l’injure, la diffamation, la médisance, la calomnie, les accusations sans preuves, l’altération des documents, la déformation des faits, le mensonge, l’incitation à la haine (religieuse, ethnique, tribale, régionale ou raciale) ainsi que l’apologie de toute valeur négative dans la pratique quotidienne de leur métier ».

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    « De placer les informations dans leur contexte et de manière factuelle et sensible, notamment en évitant les références non-nécessaires à l’identité des individus ; de signaler les propos et actes haineux ou discriminatoires au public, aux autorités nationales et à la MONUSCO. De favoriser la diversité et la représentativité de l’ensemble de la société congolaise au sein des professionnels des médias ».

    Aux Cours et Tribunaux

    Aux cours et tribunaux, le BCNUDH recommande de veiller au respect des dispositions normatives sur les discours et messages incitatifs à la haine tout en garantissant le droit à un procès équitable et le droit à la liberté d’expression.

    « D’examiner les allégations de discours et messages incitatifs à la haine à l’aune des standards du droit international des droits de l’homme, en particulier le seuil élaboré par le Plan d’action de Rabat du Haut-Commissariat des Nations Unis aux droits de l’homme ».

    Au CSAC

    Au Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC) de prévenir efficacement les discours et messages incitatifs à la haine dans les médias, notamment en veillant au respect scrupuleux des cahiers de charge et en favorisant l’autorégulation auprès des médias.

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    Aux organisations de la société civile.

    Ici, le BCNUDH recommande de s’abstenir d’utiliser des messages d’intolérance ou des expressions pouvant inciter à la violence, à l’hostilité ou à la discrimination ; De renforcer leur indépendance ainsi que l’inclusion et la représentativité parmi leurs membres tout en évitant de se fonder sur des intérêts de groupe.

    « De mettre en place un Observatoire des discours et messages haineux représentatif de la diversité de la société congolaise, et des diverses organisations dans le but de prévenir et mettre fin aux discours et messages diffusés à travers tous les canaux médiatiques, notamment avant, pendant et après les évènements politiques d’envergure », lit-on dans ce rapport.

    Abiud Olinde

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