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    Denis Mukwege refuse de capituler face à d’incessantes menaces contre lui et des membres de sa famille après son dernier tweet dénonçant le massacre de Kipupu, secteur d’Itombwe dans le territoire de Mwenga au Sud-Kivu et dans son combat pour la justice contre ceux qui ont commis des graves crimes au pays.

    En effet, dans son tweet, du dimanche 26 Juillet, le Prix Nobel congolais de la Paix avait rappelé que ce sont les mêmes qui continuent à tuer depuis 1996.

    Pour lui, le décompte macabre des morts continue parce que nombreux des auteurs sont toujours libres et jouissent de l’impunité qui règne au pays.

    “Ce sont les mêmes qui continuent à tuer en RDC. Les comptes macabres de Kipupu sont dans la ligne droite des massacres qui frappent la RDC depuis 1996. Tant que l’impunité perdurera et que les recommandations du rapport mapping des Nations-Unies seront ignorées les massacres des congolais continueront”avait-il dit.

    « Peu importe la période, peu importe la région du monde, aucun mensonge, aucune construction falsifiée de l’Histoire n’a jamais réussi à pérenniser la paix »

    Depuis ce tweet sur le massacre de Kipupu, explique Denis Mukwege dans un « Appel à la Paix« , il a reçu diverses correspondances haineuses et des membres de ma famille ont été intimidés et menacés.

    « Il y a 22 ans, je découvrais les conséquences dramatiques de la guerre sur le sol congolais, dans la région des Kivus et dans d’autres provinces de notre pays. Depuis, je n’ai cessé de militer pour la recherche de la vérité et l’application de la justice, sans lesquelles nous ne pouvons espérer une paix durable. Peu importe la période, peu importe la région du monde, aucun mensonge, aucune construction falsifiée de l’Histoire n’a jamais réussi à pérenniser la paix. Bourreaux et victimes n’ont aucun avenir s’ils sont condamnés à vivre dans le mensonge », rappelle-t-il.

    Denis Mukwege rappelle également qu’il demande depuis bientôt 10 ans, l’examen du rapport Mapping réalisé par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les Droits de l’Homme.

    « La réconciliation entre les peuples et l’instauration de réparations pour les victimes ne peuvent se faire sans que nous recherchions, sans relâche, la vérité »

    Ce rapport contient une compilation de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de crimes de génocides détaillés de 1993 à 2003.  Pour lui, sans que l’on analyse ces crimes qui jalonnent l’Histoire du Congo, sans que justice ne soit rendue pour ces crimes, « aucun peuple impliqué dans ces conflits ne pourra se relever ou ne pourra vivre en paix ».

    « Il semble que préconiser la création d’une juridiction spéciale pour juger les crimes au Congo fasse peur à certaines personnes qui déversent leur haine sur les réseaux sociaux en opposant les uns aux autres, souvent sur la base de mensonges. La réconciliation entre les peuples et l’instauration de réparations pour les victimes ne peuvent se faire sans que nous recherchions, sans relâche, la vérité », tranche le célèbre gynécologue.

    Rappelant sa célèbre phrase « Dire la vérité, c’est le début du changement », Mukwege est formel: cela est valable pour une victime de violences sexuelles comme pour une victime de guerre, de génocide ou de n’importe quel traumatisme.

    « Pourquoi ma recherche de la vérité et mon désir de justice dérangent ? »

    « Aucune malversation intellectuelle, aucune menace, aucune utilisation de la peur, ne m’empêchera de m’exprimer sur la réalité des atrocités que vivent les populations de mon pays et dont je soigne les séquelles tous les jours dans mon hôpital à Bukavu ».

    Même enfermé dans son hôpital comme une prison à cause de deux tentatives d’assassinat, Mukwege ne s’avoue pas pour vaincu car, son combat est la disparition de tous les massacres dans son pays. 

    « Depuis 2012, après deux tentatives d’assassinat, je continue de recevoir des menaces de mort. Je vis dans mon hôpital sans pouvoir en sortir sauf lors de mes voyages à l’étranger. Qui a intérêt à m’assassiner ? Pourquoi ma recherche de la vérité et mon désir de justice dérangent ? La recherche de la vérité est un processus extrêmement difficile, je comprends que je sois attaqué et menacé par des gens qui ont choisi un camp, ce n’est pas mon cas, mon combat est la disparition de tous les massacres dans mon pays » écrit-il.

    « Aucune vie n’a plus de valeur qu’une autre »

    « Chaque massacre est un massacre de trop », insiste Mukwege qui promet de continuer à répondre à la violence par l’amour.

    « Aucune vie n’a plus de valeur qu’une autre. Par le serment d’Hippocrate, j’ai décidé de dédier ma vie à aider mon prochain sans distinction de classes sociales, de genre ou d’origines ethniques. Nous continuerons toujours à répondre à la violence par l’amour », lit-on.

    Face à ces cycles de violences et de représailles qui ne profitent qu’à ceux qui cherchent à « maintenir le chaos dans le pays pour mieux le piller », Denis Mukwege lance un appel à la justice, à la coexistence pacifique et à la paix.

    Jean-Luc M.

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