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    Plus de 4.000 creuseurs artisanaux, œuvrant dans cinq sites miniers à Rubaya, à plus ou moins 45 Kilomètres à l’Ouest de la ville de Goma, dans le  territoire de Masisi au Nord-Kivu, sont obligés actuellement d’aller en chômage, pour le non-payement de leurs minerais, estimés à environ 8 millions des dollars américains,  par la Société Minière de Bisunzu (SMB).

    Selon une enquête menée par Laprunellerdc.info, ces creuseurs sont obligés d’aller en chômage, suite au non-respect des engagements pris entre la Coopérative des creuseurs artisanaux de Masisi (COOPERAMMA) et l’entreprise d’exploitation et d’exploration minière SMB, qui doit à cette coopérative un montant estimé à plus de 18 mois d’arriérés de leurs salaires, et qu’ils qualifient « d’escrocs et d’avoir entretenu une milice » dans cette entité au détriment de la population locale.

    En réaction, les responsables de la SMB, ont au cours d’un point de presse tenu à Goma le vendredi 03 mars dernier, indiqué avoir payé presque l’entièreté des salaires à tous les creuseurs. Ces derniers ont en suite promis de revenir incessamment, pour la suite de leur payement.

    «Nous avons déjà payé presque l’entièreté de la dette et sur 8 millions des dollars américains. Nous ne restons qu’avec moins de 500 milles. Aujourd’hui la SMB n’est pas à mesure de payer les creuseurs, et ils ne veulent pas amener leurs productions. C’est pourquoi s’ils ne veulent pas respecter les closes du code minier, la COOPERAMMA ne peut que tirer les conséquences.»  a fait savoir Freddy Zonga, chargé des traçabilités au sein de firme SMB.

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    Des propos rejetés par Nshimiye Kibogora Justin, coordonnateur des creuseurs miniers dans cette entité, qui précise qu’aucun contrat ne lie la SMB aux creuseurs, mais plutôt avec la COOPERAMMA, car selon lui, c’est cette dernière qui est habilitée à payer les creuseurs. Celui-ci craint pour un énième  retour des anciens combattants démobilisés dans la foret, qui ont accepté de retourner à la vie normale, en exerçant les travaux d’exploitation des minerais dans les mines de Masisi.

    A en croire Nshimiye, les creuseurs continuent à lancer des cris d’alarmes et n’ont jamais été payé, car selon lui aucun document ne justifie ce payement.

    Un puit des mines de la SMB à Masisi

    Il accuse en suite la SMB de détenir dans son périmètre d’exploitation, des « anciens miliciens » qui ne respectent pas la dignité humaine dans cette partie de la province, et craint pour une guerre en gestation qu’ignorent les autorités, et qui va bientôt exploser si ces dernières ne s’impliquent pas urgemment dans le dossier.

    «La SMB ne détient pas une police des mines. C’est plutôt un groupe armé qu’ils sont venu installer ici, et il menace la population aux vu et au su des autorités compétentes, car ils ne respectent même pas la dignité humaine. Imaginez-vous une entreprise qui détient plus de 100 éléments dans une mine, sans aucun contrôle et sur base de quelle lois? Ils n’écoutent pas le mot d’ordre des autorités et suivent seulement les consignes leurs imposées par cette société. Bref, ils imposent leurs lois dans le territoire de Masisi et nul ne peut aller à l’encontre de leur mot d’ordre. Ils tirent même à bout portant sur les creuseurs mais ne sont jamais punis.» affirme-t-il.

    Kibogora Justin ajoute en suite que les policiers commis dans la garde des mines sont en majorité des soldats, « anciens combattants » tous sortis des groupes armés-CNDP, M23-et n’ont pas assez de formation sur les lois du pays. Il appelle l’Etat congolais à prendre ses responsabilités en main, afin d’éviter le pire.

    Une affaire qui a coûté la vie à plusieurs personnes?

    Depuis l’année 2018, cette entreprise est accusée par plusieurs creuseurs d’avoir imposé l’ordre dans la mine, qui consistait à interdire à ces derniers de travailler le samedi et le dimanche. Une question  qui avait été mal digérée par certains d’entre eux, qui avaient continué à travailler. Ceci a qui a en suite créé des échauffourées entre les policiers commis à la garde de la mine et les creuseurs, causant ainsi la mort de 3 creuseurs et d’autres blessés.

    Dés lors, des procès ont été menés par la justice, mais jusque-là, aucun jugement n’a été rendu, et les familles des victimes qui n’ont jamais vu leurs personnes enterrées continuent à réclamer l’indemnisation de la part de la SMB, ainsi que l’inhumation de ces personnes dans leurs familles respectives en toute dignité.

    Selon certaines indiscrétions, cette entreprise serait même interdite de vendre les minerais à certaines sociétés d’achat sur l’échiquier mondial, suite aux violations des droits de l’homme exercées sur la population, sans aucun projet réalisé en contre partie sur les minerais extraits dans leurs concessions.

    Dans un puit des mines de la SMB dans le masisi
    Dans un puit des mines de la SMB à Masisi

    Réagissant par rapport à cette question, la SMB précise que ces échauffourées ne sont pas intervenus suite à la revendication des salaires des creuseurs, mais des personnes s’étant autorisés de travailler les jours non ouvrables, dans la mine, et qui selon eux voulaient profiter de l’absence des agents de la SMB, ainsi que ceux étatiques, pour une fraude des minerais dans le site.

    «Il faut que vous sachiez que la COOPERAMMA n’est pas la seule société à être endeuillée dans cette mine. La SMB  a perdu aussi des agents dans le temps, et nous n’avons pas fait de cela un commerce. Je pense que les corps des personnes décédées ne peuvent pas être des portes paroles d’une organisation. Et nous regrettons que ces personnes mortes soient prise en otage par la COOPERAMMA. Nous ne pouvons apporter aucun commentaire là-dessus, d’autant plus que le dossier est encore en justice. Le premier jugement est déjà là, et l’une des parties en procès a été envoyée en appel. Nous attendons seulement que justice soit rendue d’une manière définitive, et que les auteurs de cet acte soient punis conformément à la loi.» a renchéri la SMB.

    Des sources concordantes renseignent cependant que depuis le début de cette affaire, une cinquantaine de personnes auraient déjà perdu leurs vies dans différentes circonstances, pour ce seul péché d’avoir voulu piétiné l’ordre de la SMB.

    La justice toujours attendue

    Depuis plusieurs mois le dossier est allé en justice, la COOPERAMMA continue à réclamer les droits des creuseurs et la réponse aux familles des pauvres victimes. D’après Jules Hakizumwami, activiste des droits de l’homme et avocat conseil de la COOPERAMMA, une des parties en procès, les familles des victimes tuées au cours de ces échauffourées qui sont pour la plus part des propriétaires de terres, demandent la justice et leur indemnisation par la SMB, qui selon lui, posséderait également des titres minières en « violation de la loi ». Selon lui, la SMB s’est déclarée une société industrielle, pourtant elle continue à vivre des fournitures des creuseurs artisanaux.

    «Il y en a plusieurs creuseurs qui ont perdu leurs vies sur place à Masisi. Mais celles dont nous avons leurs dossiers sont devant la justice, au nombre de quatre, et leurs corps gisent depuis plusieurs mois à la morgue de l’Hôpital provincial Parmi les dossiers il n’y a qu’un seul qui a été jugé, dans le quel SMB a perdu. Et celle-ci continue à mener plusieurs actes dilatoires, dans le non-respect des conventions, et cela en recrutant des mercenaires et des miliciens estimé à plus de 100 hommes non reconnus par les autorités, qui tuent chaque jour des creuseurs sur place.» a-t- regretté.

    En attendant l’issu du dossier en justice, plusieurs observateurs émettent le vœu de voir l’Etat prendre ses responsabilités, en menant une mission d’inspection au sein de cette société, pour tirer les choses au clair.

    Freddy Ruvunangiza, depuis Goma

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