Le Professeur Barnabé Kikaya croit savoir quand est-ce que Joseph Kabila, ancien président de la RDC; a commencé à être détesté notamment par des occidentaux, passant de « l’enfant chéri » de 2001 à la « bête noire » à partir de 2007.
Dans une réflexion publiée ce lundi 21 décembre 2020, cet ancien député évoque entre autre comme raisons, rapprochement de Kabila avec la Chine; mais aussi de la nouvelle loi minière qui revoit l’assiette fiscale de redevance au Trésor public.
DE L’ENFANT CHERI DE 2001 A LA BETE NOIRE DEPUIS 2007
Qui est Joseph Kabila, passant aujourd’hui pour la bête noire des Occidentaux confondus aux partenaires extérieurs. Comme ce fut le cas de L-D. Kabila, de Mobutu et de Kasa-Vubu. Ou comme ce sera le cas demain de Félix Tshisekedi?
Lorsque le 18 janvier 2001, il succède à son père Laurent-Désiré Kabila assassiné deux jours plus tôt, il sait ce que représente le Congo aux yeux des Occidentaux : un enjeu hyper-stratégique. Il est au courant des convictions de Bill Richardson exprimées devant le congrès américain le 5 novembre 1997, soit quatre ans presque avant de devenir chef d’Etat : « Le Congo est un élément essentiel des intérêts américains en Afrique. Ce pays renferme des opportunités économiques énormes » au motifs que le pays dispose de 13 % du potentiel hydroélectrique mondial, 25 % des réserves mondiales de cobalt, 18 % des réserves mondiales des diamants industriels, 6 % des réserves mondiales de cuivre. Il a entendu Bill Richardson renchérir : « Le moteur de croissance du centre de l’Afrique est le Congo » et que « La stabilité du Congo signifie la stabilité pour la plus grande partie de l’Afrique ».
Lorsqu’il est reçu en audience à la Maison Blanche par Georges Bush père, Joseph Kabila déclare : « Je suis venu remettre le Congo sur la table des décideurs pour un partenariat gagnant-gagnant ».
Que s’est-il passé pour que l’enfant chéri de 2001 devienne la bête noire à partir des années 2007 ? Tout le monde a la réponse : principalement le rapprochement avec la Chine et le discours souverainiste, mais aussi la nouvelle loi minière qui revoit l’assiette fiscale de redevance au trésor publique ainsi que l’organisation des élections sur fonds propres.
Pour parler du seul contrat sino-congolais, il n’aurait pas existé, ou tout au moins dans sa forme initiale, si l’Occident avait tenu sa promesse faite aux Congolais en prévision du référendum de 2005 et des élections présidentielle et législatives de 2006.
Le belge Louis Michel avec qui j’ai eu à échanger longuement sur le sujet est vivant : il avait encouragé les Congolais à participer à ces échéances parce que c’était la condition sine qua non au retour des investissements occidentaux en RD Congo. Pour rappel, l’Union européenne avait financé ces élections à près de 90 %. Pour rappel aussi, les derniers investissements occidentaux remontaient aux années 1985 ! De 1990 à 2006, on n’avait revu aucune société belge, française, américaine, allemande ou britannique du genre Acec, Goodyear, GM, Castel, Spie Batignole, Alcatel, Danzer Group, Eni.
Dans la tête du congolais lambda, les élections de 2006 devaient ramener ces entreprises génératrices d’emplois au pays.
La suite? Comme c’est le cas pour 2019 et 2020 les deux premières années de pouvoir du Président Tshisekedi, 2007 était passée, et 2008 s’était annoncée sans le moindre engagement de financement rassurant. Ou plutôt si : la Banque mondiale s’était signalée avec 150 millions de dollars.
Lassé d’attendre des promesses devenues plutôt évasives avec tous les risques de remise en cause des acquis de la première présidentielle libre et pluraliste en 46 ans d’Indépendance, Joseph Kabila, à son corps défendant, décidera de regarder vers Beijing sans pour autant tourner le dos aux partenaires occidentaux de la RDC! Voilà l’origine du contrat sino-congolais fondé sur le principe du troc « infrastructures de base en contrepartie de l’exploitation minière ».
Aujourd’hui, le débat ne porte pas sur ce contrat mais sur l’accusation à charge de Joseph Kabila d’avoir privilégié la Chine au détriment des pays occidentaux alors que c’est plutôt l’Occident, souverain dans ses choix, qui n’a pas tenu parole ! Parmi ces choix, celui de placer le Congo dans l’assistance humanitaire qui, elle, n’a jamais développé un seul pays au monde. C’est connu.
Barnabé Kikaya Bin Karubi