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    Bernard Zagabe, Cadre du Front Commun pour le Congo (FCC) n’approuve pas totalement la démarche de certains députés provinciaux issus de sa plateforme politique qui ont signé une pétition demandant la déchéance du bureau permanent de l’Assemblée provinciale du Sud-Kivu.

    Au cours d’une interview exclusive accordée à Laprunellerdc.info, ce cadre du FCC dit donner une position personnelle et demande aux députés de ne pas « jouer la carte de l’ennemi » (Interview)

    Laprunellerdc.info : bonjour : ça bouillonne à l’Assemblée Provinciale, est-ce le FCC qui veut reconfigurer la situation politique en province ?

    Bernard Zagabe : Je réagis comme une personnalité du FCC Sud-Kivu. Mon point de vue n’engage pas une structure quelconque. Ça engage ma personnalité politique. Nous avons appris qu’il y aurait une pétition contre les membres du bureau de l’assemblée provinciale, que nous n’avons pas encore lu d’ailleurs. Si cela serait vrai, ce serait une imprudence de la part de nos amis députés.

    Laprunellerdc.info : pourtant, vous le savez, que c’est aussi dans leurs attributions

    Bernard Zagabe : D’abord, oui, constitutionnellement ils ont droit de le faire mais politiquement un député n’est pas n’importe qui. Un député c’est la crème de l’élite politique que nous avons dans nos partis et structures politiques. Et la politique ne s’observe pas mais elle se joue.

    Laprunellerdc.info : Sommes-nous en train d’imposer des comportements aux élus ?

    Bernard Zagabe : Même dans un terrain de football, on peut avoir du talent mais on ne s’appartient plus. On ne se réveille pas le matin, parce qu’on est Cristiano Ronaldo et avoir une place au terrain. On doit d’abord être classé par le Coach, qui évalue et défini le mode de jeu qu’on doit faire respecter.

    Laprunellerdc.info : vous rappelez les règles du jeu, mais concrètement qu’est-ce que ça signifie ?

    Bernard Zagabe : Nous pensons que la province du Sud-Kivu est entrain de traverser le moment le plus dur. Et dans nos regroupements politiques, FCC et CACH, nous sommes dans une situation sérieuse qui voudrait que nous restions soudés. Et si tel n’est pas le cas, donc nous sommes en train de jouer la carte de l’ennemi. Et ça, nous devons éviter. Le vrai problème du Sud-Kivu, est ailleurs, et nous devons demander à nos députés de faire attention, de ne pas jouer la carte de l’ennemi.

    Laprunellerdc.info : voudriez-vous être un peu plus clair ?

    Bernard Zagabe: je voulais dire que la gouvernance du Sud-Kivu a atteint un niveau où le commun des mortels se pose la question si réellement nous avons des députés ou pas. Mais compte tenu des contextes socio-politiques, sanitaires et sécuritaires que nous traversons pour le moment, les députés devraient se poser la question de savoir pourquoi ça fait bientôt trois mois qu’ils n’ont pas siéger, pendant qu’ils sont dans une session ordinaire. Et donc, s’ils sont dans une session ordinaire et qu’ils n’arrivent pas à siéger, à accéder à leurs bases, c’est-à-dire qu’ il y a un ça ne va pas. Et la population attend beaucoup des députés aujourd’hui, pour comprendre leurs vrais problèmes. Les vrais problèmes, c’est la gouvernance, la gestion salutaire de la province.

    Laprunellerdc.info :  Pour Bernard Zagabe en face de nous, la question du bureau de l’Assemblée Provinciale n’est pas prioritaire, la gestion c’est ailleurs ?

    Bernard Zagabe : Pendant que nous sommes en train d’apprendre qu’il y a des hôpitaux qui vont commencer à faire payer les malades de Covid-19, par manque des moyens financiers, ici on nous parle des petits intérêts des membres du bureau de l’Assemblée Provinciale et les députés. À l’heure où nous parlons, nous sommes en train de compter le nombre des morts liées à la violence policière, le manque des tactiques dans l’intervention de la police. Et les députés devraient rencontrer le commandant de la police pour lui poser des questions, pour quoi à chaque intervention il doit y avoir des morts.

    Laprunellerdc.info : plusieurs questions qui doivent trouver des solutions…

    Bernard Zagabe : c’est le temps de le dire ! Nous constatons qu’il y a des fortes mobilisations des délégations venant de partout au monde à Goma, mais elles n’arrivent pas à Bukavu. Cela peut être dû à quoi ? Une situation qui manifeste une crise de leadership dans le lobby lié à la gestion de Covid-19. Et tout ça, ce sont des problèmes qui nous agacent. Il y a des morts en cascade au Sud-Kivu, qu’en disent les députés ? Dans les milieux ruraux où ces députés ont été élus, c’est comme si la problématique de Covid-19 n’est pas un sujet à l’ordre du jour. Vous arrivez à 10 mètres de Kazingo, on vous dit que Covid-19 est une maladie de la ville. C’est-à-dire qu’il y a un problème de sensibilisation. 

    Laprunellerdc.info : si nous revenons à la pétition, vous disiez critiqué le côté politique ignoré par les élus provinciaux.

    Bernard Zagabe : Nous pensons que le FCC est une structure politique sérieusement organisée. Et l’autorité morale du FCC a décidé de donner la commande au Coordonnateur national, et lui, collabore directement avec le coordonnateur provincial. C’est-à-dire que tout agissement politique de nos députés devrait être contrôlé, suivi, et géré par leurs familles politiques. Nous invitons les députés de notre famille politique, à la sagesse. Et la sagesse voudrait que nos députés puissent revenir à notre hiérarchie pour un débat sincère, un débat pouvant nous rendre tous forts.

    Laprunellerdc.info : ce que vous semblez dire aux élus est que ce n’est pas aussi facile de refaire les choses à l’Assemblée provinciale.

    Bernard Zagabe : Pour mettre ce bureau en place, nous avons fait quatre jours à l’Hôtel « Orchid ». Il y a eu des délégations de Kinshasa. Donc, ce n’est pas venu du hasard. Ce n’est pas quelqu’un qui s’est réveillé le matin et est devenu membre du bureau. C’est le fruit de beaucoup des conciliabules, des sacrifices et concessions. Nous ne pouvons pas gérer avec des humeurs cet investissement politique que nous avons mis ensemble avec une forte mobilisation. On ne fait pas la politique avec des humeurs, avec des caprices des individus. On fait la politique avec des consignes.

    Laprunellerdc.info : justement, est-ce que ce n’est pas consigne à voir le nombre des sociétaires du FCC signataires ?

    Bernard Zagabe : jusque-là le mot d’ordre n’est pas encore donné, pour bouger telle ou telle autre institution. Il n’y a pas péril en demeure et nous pensons qu’au niveau de notre famille politique il peut encore y avoir des solutions. Nous invitons nos députés à comprendre qu’ils ne sont pas les premiers à avoir été élus dans l’histoire politique de ce pays. Il y en a qui ont été des députés il y a 12 ans, ils ont fait partir beaucoup des Gouverneurs, et aujourd’hui ils sont comme tout citoyen. Par conséquent, il y a 3 ans qui nous restent là devant, on peut décider de cracher sur son parti aujourd’hui, mais demain ? Est-ce que vous n’aurez pas besoin de votre parti?

    Laprunellerdc.info : enfin quel message concret donnez-vous aux élus de votre plateforme politique qui disent qu’ils ne reculeront pas avant que le bureau ne soit déchu ?

    Bernard Zagabe : je les invite à la sagesse, surtout ceux du FCC et comprendre qu’ils ne sont pas dans une même situation avec ceux de L’UNC. Ceux de L’UNC sont, peut-être en difficulté aujourd’hui du fait que leur leader a des difficultés politiques. Ils peuvent penser qu’ils deviennent libres. Les amis de Lamuka ont tendance à être désordonnés. Mais, nous du FCC, nous sommes structurés, suivis et contrôlés par la plus haute hiérarchie. Et donc, on ne peut pas se réveiller un matin et penser qu’on s’appartient. Vous êtes intelligent oui, compètent, vous avez des règlements, mais vous êtes arrivés là-bas par solidarité et au nom de cette solidarité nous devons doser certaines choses au nom de la solidarité interne. Je fais confiance en notre autorité morale, en nos députés, à la Coordination Nationale du FCC, je fais même confiance aux membres du bureau et à la Coordination provinciale du FCC et du reste de la structure politique de tous ces députés. L’idéal serait de lancer le débat interne et si tel n’est pas le cas, nous risquons d’ouvrir une porte pour l’ennemi de notre famille politique. Une porte que nous pourrons avoir difficile à fermer.

    Propos recueillis par Bertin Bulonza

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