22 ans après l’assassinat de l’ancien archevêque de Bukavu Monseigneur Christophe Munzihirwa, les hommages se multiplient pour honorer la mémoire de cet homme dont le combat pour la justice et la paix fait l’unanimité.
Mais pour Jean-Chrysostome Kijana, président National de la Nouvelle Dynamique de la Société Civile en RDC, au-delà des hommages, il faut se demander ce que les congolais ont fait de l’héritage de Christophe Munzihirwa dans la lutte pour la démocratie, la bonne gouvernance, la paix; etc.
Celui-ci dénonce également l’impunité dont jouissent les meurtriers de ce prélat catholique comme de plusieurs millions des congolais assassinés depuis deux décennies. (Tribune)
« 29 octobre 1996 – 29 octobre 2018 ça fait exactement 22 ans jour pour jour depuis que mourait Mgr Christophe MUNZIHIRWA M. Ce serviteur de Dieu et ardent défenseur des droits de l’homme, de la liberté, de la justice sociale et de l’intégrité territoriale de notre pays fut abattu à bout portant par des hommes en arme après qu’ils l’aient bien identifié et reçu ordre de quelque part pour l’éliminer. C’était à l’entrée des éléments de l’AFDL et leurs alliés rwandais dans la ville de Bukavu en 1996.
Vingt-deux ans après, ses meurtriers ainsi que leurs commanditaires courent toujours. Aucune enquête officielle entreprise par l’État congolais. Comme pour ces plus de sept millions de mort à la suite de toutes ces guerres, c’est l’impunité totale.
Mgr MUNZIHIRWA a payé de sa vie pour La Défense et l’amour du Congo. Pour son franc parler. Pour son combat et engagement pour les valeurs humaines universelles, notamment le respect et la dignité due à tout être humain, l’égalité sociale, la justice équitable pour tous, les droits de l’homme, la démocratie, la bonne gouvernance,…
Nous sommes nombreux qui l’avons connu. Nombreux qui l’avons côtoyé et vécu avec lui. Nombreux qui avons suivi ses prédications. Nombreux qui avons communié de sa ciboire et calice. Nombreux qui sommes passés par ses mains comme séminaristes, prêtres, religieuses, religieux, laïcs engagés et fidèles chrétiens.
Vingt-deux ans après, une question doit retenir notre attention à nous tous :”Qu’avons-nous fait de son héritage?” Du ciel où nous regarde ce saint homme de Dieu, est-il fier de nous tous qui avons bénéficié d’une ou d’une autre manière de sa sainte vie sur terre? Et nous-mêmes, en sommes-nous fiers?
Prêtre, Mgr MUNZIHIRWA a vécu son serment de chasteté et de pauvreté. De nos jours où la recherche effrénée du lucre nous caractérise tous, Combien d’entre ses compères dans le sacerdoce qui le vivent comme lui? Combien se sentent-ils aujourd’hui révoltés au vu de la misère et souffrance des pauvres? Combien osent-ils se ranger du côté et aux côtés des opprimés et marginalisés?
Combien se sont sentis touchés et interpellés par ce drame humain qui se vit à Mbobero sur ces collines qu’escamotait MUNZIHIRWA? Combien sont-ils ceux qui ont pris le courage de dire la vérité à ceux qui oppriment cette pauvre population de Mbobero qui vit aujourd’hui dans une prison à ciel ouvert privés de toute dignité humaine? Combien ont-ils pris le courage de s’opposer à des manipulations de tout genre tendant à extorquer des pardons à cette population, à majorité catholique, à qui on a TOUT ravi?
Et nous autres fidèles catholiques et citoyens congolais qui avons bénéficié aussi de la vie de ce saint homme, que faisons-nous de son héritage? Combien sommes-nous aujourd’hui capables et prêts à se battre jusqu’au sacrifice suprême pour que le Congo, notre pays reste un et indivisible?
Combien sommes-nous prêts aujourd’hui à se battre jusqu’à la mort pour que règnent la paix, la justice sociale et distributive, la démocratie, la bonne gouvernance, les droits de l’homme et l’entente entre les peuples?
Combien sommes-nous prêts à nous mettre du côté et avec les opprimés?
Vingt-deux ans après le martyr de Mgr Christophe et en ces jours où notre pays traverse une zone de fortes turbulences, en ces jours où le sang des Congolais est quotidiennement versé un peu partout et à Beni en particulier,
en ces jours où plus que jamais l’intégrité de notre pays est plus que menacée,
en ces jours où les quelques avancées démocratiques acquises au prix du sang sont sérieusement menacées; il est de notre devoir collectif de nous remettre chacun en cause.
Évêques, prêtres, religieuses et religieux, laïcs engagés, fidèles catholiques ainsi que l’ensemble du peuple congolais, arrêtons-nous un instant pour une introspection.
Comme dirigeants de l’Église et/ou de l’Etat, comme responsables chacun à son niveau, ces deux petites questions: « Qu’ai je fais de mon semblable ? » « Quel sort vais-je léguer aux générations futures ? »
Que le sang de notre Père Évêque ainsi que celui de tous les martyrs et victimes des guerres en RDC constituent pour nous une véritable semence pour la paix, la justice, les droits de l’homme, la démocratie et l’amour entre les peuples.
Mgr Christophe MUNZIHIRWA prie pour nous et pour ce pays que tu as aimé jusqu’au sacrifice suprême.
Jean Chrysostome Kijana, laïc catholique et un des fidèles de Mgr MUNZIHIRWA »